Intéressante analyse (de l'exclusion évolutionnaire des égoïstes et de la tendance au rassemblement des altruistes).

Un "paradoxe" évolutionnaire central, relevé par le bouddhisme depuis 2500 ans, c'est que l'évolution des espèces a conduit certaines d'entre elles à être dotées d'une "conscience de soi" presque incapable de prendre conscience que, dans le même temps, le "soi" est une illusion de l'esprit (la fameuse "illusion de l'ego" dont Ricard parle d'ailleurs à de nombreuses reprises dans le même bouquin). Et donc incidemment que le libre-arbitre est une illusion au sens que "l'arbitre" (le soi) est une illusion de l'esprit (au sens d'une entité autonome).

Une condition centrale de l'altruisme, voire LA condition essentielle, prioritaire, cruciale pour une réplication éthique à long terme, c'est d'arriver à éveiller les esprits à cette illusion de l'ego. L'étape qui suit cette prise de conscience étant la "conscience étendue" (la prise en compte de toute souffrance dans le monde comme "sa" propre souffrance), déjà évoquée dans le forum ukratio. Mais cette prise de conscience est nécessairement cognitive, et contre-intuitive : un altruisme rationnel est profondément contre-nature ! (car la nature conduit au contraire à la conscience d'un ego qui est illusoire, mais au fondement de "égoïsme")

À partir du moment où une personne comprend ce qu'est l'illusion de l'ego, alors tout "égoïsme" disparaît, qu'on soit dans une société avec ou sans monnaie : selon cette thèse, ce n'est pas la monnaie qui crée le désir égoïste, mais l'illusion de l'ego... Donc pour aboutir à une société altruiste, il serait peut-être plus rationnel de prioriser l'éveil des consciences quant à l'illusion de l'ego et à l'extension de conscience. Mais rien n'empêche de cherche à perfectionner le fonctionnement du collectif en supprimant la monnaie, tout en ayant conscience que ce n'est pas central pour mettre fin à "l'égoïsme" et à l'extinction des désirs socialement nocifs.

À ce sujet, une jeune chercheuse de ma connaissance est en recherche d'une codirection de thèse (en philosophie analytique) sur cette démonstration rationnelle de l'illusion de l'ego : à bon entendeur !