Face à un malaise, et donc, en particulier, un conflit, nous réagissons de l'une des quatre façons suivantes: nous ripostons, nous supportons, nous fuyons ou nous réfléchissons.
Ceci est le contraire de la solution, puisque comme nous venons de le voir, c’est précisément la tendance à riposter qui détermine le cercle vicieux de la violence. C’est le principe même du conflit au sens strict !
Certes, ce mécanisme peut se justifier dans des cas particuliers : si un individu de taille modeste se jette sur moi avec l’intention de me poignarder, et qu’il n’est pas possible de m’enfuir, il est bon que mon organisme mobilise rapidement une force et une attention importante pour maîtriser l’agresseur. Tel est le rôle de la colère. Il s’agit alors d’une légitime défense nécessaire à court terme. De telles circonstances sont exceptionnelles dans la vie moderne…
En pratique, comme disait Gandhi, "œil pour œil, dent pour dent", ne fait jamais que des aveugles et des édentés…
La « solution » la plus simple consiste à ne rien faire, même mentalement : à se contenter de supporter. Dans ce cas, la souffrance produite en nous est toujours présente. De plus, si l’on n‘y prend pas garde, l’instinct punitif demeure actif, inconsciemment. L’hostilité ne disparaît pas, mais reste stockée en nous.
Si le malaise se reproduit souvent, ce qui sera typiquement le cas dans une vie en communauté, la quantité de colère accumulée augmente… jusqu’à l’explosion. Cette dernière est alors difficile à comprendre pour les autres, et peut être particulièrement injuste et inappropriée. C’est l’effet « cocotte minute ».
Vu que, pour des raisons évidentes, on a tendance à supporter sans broncher les agressions des plus forts, c’est souvent aux plus faibles que nous faisons payer notre souffrance (inconsciemment)…
Vu que nous avons généralement dû supporter de nombreuses paroles désagréables dans le passé (« range ta chambre », « tu as fait tes devoirs ? » etc.) il y a en nous beaucoup de colère accumulée, qui pourra être activée par certaines remarques ou situations…
La colère rentrée peut encore avoir des effets néfastes sur notre propre santé.*
Bref, le refoulement ne fait que déplacer le problème et le rendre plus inextricable.
La fuite consiste à éviter physiquement la source du malaise. Cela peut être une sage mesure, dans certains cas. La fuite correspond d’ailleurs à un instinct profond, tout comme le combat, d’où sa mise en œuvre fréquente.
Mais comme nous le verrons, il y a des solutions beaucoup plus enrichissantes et constructives. De plus, dans la perspective d’une vie en communauté, c’est typiquement une cause d’échec... Beaucoup s’enfuient au moindre problème, et se condamnent donc à rester seuls.
Vu qu’il n’est pas possible concrètement d’éliminer toute interaction avec autrui (nous ne disposons que d’une planète), cela ne fait que reporter le problème. Un mode de vie individualiste renforce paradoxalement les conflits d’intérêts : chacun étant centré sur l’accaparement nécessaire de ressources matérielles pour sa tranquillité ou sa survie, et celles-ci étant limitées, il y a compétition... qu’on le veuille ou non.
Le repli sur soi, s’il peut être salutaire à court terme, est une solution illusoire pour le long terme.
L'abondance des conduites addictives dans notre société est probablement une manifestation du réflexe de fuite.
La fuite n’est pas nécessairement physique, elle peut consister à ne pas écouter autrui (pour ne pas souffrir du malaise que cela pourrait induire), ou encore à le « juger » pour justifier notre non-écoute.
Au lieu de réagir sans se poser de questions, ce qui entraîne la riposte, la fuite ou l’inhibition (supporter), conformément aux trois réactions élémentaires* répandues dans le règne animal : le combat, la fuite et la paralysie (inhibition), on peut mettre en œuvre une démarche rationnelle : observer, relier, décider.
Observer ce qui se passe autour de soi, mais aussi et surtout en soi. Déterminer les causes et les conséquences probables des différentes observations, en se fondant sur l’expérience et la logique (ce qui revient à « relier » d’une certaine façon ses différentes observations). Puis décider consciemment en fonction de ce que l’on sait et de ce que l’on veut au plus profond de soi.
L’aboutissement de cette réflexion pourra être, dans certains cas (plutôt rares), la riposte, la fuite ou l’inaction… mais l’attitude choisie tendra alors à être plus favorable à nos objectifs à long terme qu’en l’absence de réflexion. Bien sûr, cette démarche n’est possible que lorsque l’on dispose du temps nécessaire, mais c’est généralement le cas…
La décision à prendre dépend bien entendu des circonstances exactes dans lesquelles on se trouve. Les remarques générales qui suivent sont toutefois utiles.
Pour que la réflexion soit efficace, elle ne doit pas se faire sous l’emprise d’une trop forte émotion (colère ou peur). Il importe donc de réduire celle-ci, le cas échéant.
Pour ce faire, rien de tel que l’observation de ce qui se passe en soi, de ses sentiments, le tout conjugué à une volonté de détachement, et au besoin d’une respiration ample et lente. C’est lorsque les émotions agissent inconsciemment qu’elles sont plus actives et déterminent des comportements moins appropriés.
* voir à ce propos les traveaux d'Henri Laborit, et en particulier, concernant les méfaits de l'inhibition de l'action, ses expériences sur des rats.
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