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Ukratio, pour une société vraiment plus juste, durable et fraternelle
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Questions à un ami utopiste

III Une autre culture


2 Une culture rationnelle

- Que faut-il entendre par « rationnel ». Parce que ce concept me semble assez vague. Beaucoup de gens le récupèrent pour désigner des choses très différentes.

- Par « rationalité », nous entendons essentiellement une méthodologie, une démarche intellectuelle relativement à la question de la vérité. Il s'agit de respecter un certain nombre de principes.

- Lesquels  ?

- Tout d'abord : faire preuve de beaucoup de circonspection. Ne pas se précipiter sur les vérités qui nous plaisent, mais prendre beaucoup de soin à vérifier. J'ajouterais : pratiquer le doute. C'est-à-dire, rester ouvert à toute remise en cause de ses propres jugements.

- C'est ce que l'on appelle l'esprit critique.

- Tout à fait.

- Mais cela ne nous dit pas comment établir la vérité, ou du moins, fonder ses propres jugements. À la limite, c'est stérile, purement destructif. Or, il m'a semblé que vous vous vouliez constructifs... 

- Tout à fait. C'est parce que je n'ai fait que commencer à décrire la rationalité : je n'ai pas terminé, elle ne se limite pas à cela. C'est juste important de commencer par là, car il y a certaines attitudes spontanées, comme prendre ses désirs pour la réalité, qu'il faut impérativement surveiller avant d'aller plus loin, en pratique. Sinon, la rationalité elle-même, serait facilement invoquée pour soutenir n'importe quoi (à tort, bien entendu).
Ensuite, les principes « positifs » sont simples : observer aussi précisément que possible, puis interpréter au moyen de la théorie descriptive la plus simple, qui, dans le domaine d'observation où l'on se trouve, n'a jamais été mise en défaut. Et il se trouve qu'ainsi, on obtient des théories remarquablement puissantes.

- Alors, par exemple, lorsque je dis : « l'univers a été créé par Dieu », je fournis là une théorie particulièrement simple (pour expliquer l'univers, difficile de faire mieux !), qui, à ma connaissance, n'a jamais été mise en défaut...

- Sauf que cette théorie là est purement explicative, elle n'est pas descriptive...

- Que faut-il entendre par « descriptive »  ?

- ...que ladite théorie permet de rendre compte avec précision d'un maximum de phénomènes. Lorsque tu dis « L'univers a été créé par Dieu », tu fournis une explication verbale, mais tu ne décris pas précisément tout ce que tu peux observer. Cette théorie là n'est d'ailleurs pas « remarquablement puissante » : elle ne permet pas, en elle-même, de prédire quoi que ce soit. Voilà pourquoi, cela n'appartient pas au domaine de la rationalité.
Lorsque je dis qu'un corps en chute libre a un mouvement d'accélération uniforme, l'accélération étant inversement proportionnelle au carré de sa distance au centre de la terre, je décris réellement quelque chose et je donne les moyens de prévoir un mouvement (quand et où l'objet va toucher le sol, par exemple).

- N'est-ce pas ce que l'on appelle la démarche scientifique  ?

- Tout à fait.

- Pourtant, les théories scientifiques évoluent, elles rencontrent rapidement leurs propres limites. La physique quantique, par exemple, a mis à mal le principe de déterminisme... la notion même de réalité, ou du moins, son indépendance de l'observateur... choses pourtant bien ancrées dans la pensée matérialiste.

- « rapidement » est une appréciation subjective : on n'a pas ce genre de révolution théorique tous les jours ! Les théories évoluent, bien sûr, pour prendre en compte, justement, des observations correspondant à des « domaines » de plus en plus étendus ; par exemple : des objets de plus en plus petits ou se déplaçant de plus en plus vite. Lorsqu'une théorie n'est pas vérifiée dans un nouveau domaine d'observation, on s'enquiert d'une nouvelle qui explique plus de choses, généralement au prix d'un accroissement de complexité (puisque ces théories sont les plus simples possible). Mais les théories anciennes ne sont pas « abolies », elles continuent d'être parfaitement valables dans leur domaine de validité. C'est ainsi qu'à échelle humaine ou astronomique, la réalité est bien une notion indépendante de l'observateur... et le déterminisme « classique » reste valable. Il ne faut pas confondre l'introduction d'une nouvelle théorie scientifique, avec une supposée remise en cause de la réalité voire de la science !

- Et le rêve dans tout ça. N'y a-t-il pas quelque chose de déshumanisant, à se limiter ainsi à la démarche scientifique ?

- Nous ne nous « limitons » pas à la démarche scientifique ! En quoi adopter cette attitude pour résoudre les problèmes techniques qui se posent à nous, nous empêcherait de rêver ? Utiliser un outil n'empêche pas de faire autre chose qu'utiliser cet outil ! La recherche scientifique est d'ailleurs elle-même porteuse de rêve. Ce qu'empêchent, par contre, la démarche rationnelle, l'esprit critique, c'est la tromperie, la manipulation, non pas la beauté ou l'enthousiasme. Or, la tromperie et la manipulation sont souvent une source de problèmes ; ce sont les instruments du pouvoir informel. Problèmes bien connus, en particulier dans les organisations « alternatives »... Cette culture rationnelle est donc une protection contre ce phénomène. Nous avons vu que l'ucratie, par son organisation politico-économique s'oppose à toute hiérarchie formelle. Nous voyons maintenant, que cette société se prémunit également face aux hiérarchies informelles ; là encore, en s'en donnant réellement les moyens... Ce choix est cohérent avec notre démarche pour plus d'égalité, de liberté et de fraternité.

- Et que faites-vous de tous les méfaits de la science ?

- Quels méfaits  ?

- OGM, pesticides, armes nucléaires...

- Ce ne sont là que des applications de connaissances scientifiques. La science, du fait de son efficacité, nous apporte une certaine puissance, que l'on peut utiliser en bien ou en mal... La démarche scientifique n'a rien à voir avec le fait de faire la guerre ou de polluer inconsidérément, contrairement à la cupidité ou au nationalisme, par exemple ! C'est essentiellement un facteur d'efficacité, ce qu'on en fait dépend de nos objectifs. Et c'est là qu'est la différence avec le capitalisme : nous ne suscitons pas les mêmes objectifs. L'ucratie, c'est mettre l'efficacité au service du mieux-être de tous.

- Le capitalisme prône la destruction ?

- Non, mais il hypertrophie certains désirs, lesquels font concurrence aux objectifs humanistes. Entre gagner un peu plus de sous et polluer un peu moins la planète, il fait pencher la balance dans un certain sens... Il fait également en sorte que les intérêts de chacun s'opposent à ceux de nombreuses autres personnes, ce qui induit une situation conflictuelle. Donc, il ne prône pas la destruction, il la crée sans le dire, sournoisement, en agissant au niveau des causes...

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